Problème : il s'agit de me débarrasser de mon gros sac à dos pour visiter le temple. Malheureusement il n'y a pas de consigne dans cette petite gare routière, et les deux hôtels et le restaurent à qui j'essaie de le confier y compris moyennant finances n'en veulent pas. Je me demande si je ne vais pas être obligé de repartir tout de suite. Arpentant la rue informe qui mène au temple, j'avise une résidence un peu moins guindée, et je soudoie le réceptionniste pour qu'il garde mon linge pendant deux heures.
Approchant du temple, j'enlève mes sandales et commence à les mettre dans un sachet en plastique quand un jeune Tamoul m'aborde et m'indique où les déposer. Je lui indique mon sac, et il me dit que ce n'est pas possible, c'est sacré, je ne peux pas rentrer avec mes chaussures. Il est jeune, a l'air intelligent, et ne parle pas trop mal anglais. Je me dis que je vais l'avoir comme guide mais que je pourrais tomber plus mal.
Le temple dédié à Shiva sous sa forme Nataraja (danseur) est particulièrement sacré en Inde. Il a été construit par la dynastie Chola entre 1130 et 1250, pour qui Shiva Nataraja était la divinité tutélaire. Moins spectaculaire par ses sculptures que d'autres sanctuaires cholas que je découvrirai ultérieurement, il m'a particulièrement impressionné par la ferveur que j'y ai ressentie. Pour une fois tout était intégralement accessible, ceci étant peut être dû à l'absence totale de touristes. Il s'agit pourtant d'un temple de dimensions très imposantes, objet de cultes extrêmement actifs et de pèlerinages.
Shiva sous sa forme Nataraja est le danseur cosmique bien connu (ici un bronze chola du XIIème, visible dans le musée de Tanjavur) : la jambe gauche levée, il tient dans ses deux bras supérieurs un tambour (le son primordial de la création de l'univers), une flamme (la destruction du monde), et fait avec deux autres mains un geste de protection et la désignation de sa jambe levée (espoir de liération). Il piétine un nain symbole de l'ignorance et est entouré d'un cercle de flammes symbolisant la succession des cycles cosmiques.
Shiva est un danseur tellement exceptionnel que lors d'un concours avec son épouse Kali, arbitré par Vishnu, il aurait ramassé une boucle d'oreille tout juste tombée avec son pied et l'aurait remise en place, mouvement qui lui assura la victoire.
L'intérieur du sanctuaire est constitué de galeries très larges, sculptées, sombres, conçues pour permettre la circumambulation des fidèles et des processions. Car il se passe toujours quelque chose dans ce temple : ici on oint une statue de Durga avec un liquide ocre, ailleurs on passe des flammes autour d'une statue de Siva. Fleuries, habillées, souvent noircies par les libations, enfoncées dans des niches auxquelles seuls les prêtres accèdent, sous le regard des fidèles alignés contre des barrières sur une vingtaine de mètres devant la niche, afin que tous puissent voir, les dieux sont difficilement reconnaissables. Un hindou me laisse sa place pour que je puisse mieux voir, et me guide jusqu'au rituel qui prend instantanément la relève. L'ambiance est fervente, beaucoup d'hindous prient ou se prosternent, mais détendue, d'autres se reposant contre des colonnes, mangeant, parlant ou dormant. Beaucoup de prêtres ont d'ailleurs les mêmes comportements quand ils n'officient pas.
Puis, à 19h, c'est la procession de la statue de Parvati allant rejoindre son époux Shiva pour la nuit. Elle est portée, sous un dais, sur un pavois par quatre prêtres torse nu, coiffés d'un chignon placé sur le côté du crâne. Ils sont précédés par des joueurs de tambours et de petites cymbales. Certains prêtres portent un smartphone coincé à la taille dans leur dhoti. Une fois les deux divinités réunies, les prêtres referment pudiquement la porte de la cellule.
Je ne suis pas sûr d'avoir tout correctement interprété car mon guide ne m'a pas accompagné : il est resté à l'extérieur du sanctuaire. Je pense qu'il ne souhaite pas se faire remarquer par les prêtres qui normalement sont censés assurer ce service de guide (bien qu'aucun ne m'ait proposé quoi que ce soit, et pourtant j'étais facilement repérable). Mais je ne lui en veut pas car il est étudiant et parle même quelques mots de français.
Je ressors du temple bien content d'avoir vu autant de choses aussi intenses. Je n'aurai pas d'expérience plus forte pendant ce voyage.
Je récupère mon sac et file prendre un bus pour Kumbakonam, ma prochaine destination, où j'arriverai éreinté mais sur un nuage, très tard, dans un hôtel un peu défraichi, mais qui me servira dans ma chambre un repas chaud très correct.
Le temple dédié à Shiva sous sa forme Nataraja (danseur) est particulièrement sacré en Inde. Il a été construit par la dynastie Chola entre 1130 et 1250, pour qui Shiva Nataraja était la divinité tutélaire. Moins spectaculaire par ses sculptures que d'autres sanctuaires cholas que je découvrirai ultérieurement, il m'a particulièrement impressionné par la ferveur que j'y ai ressentie. Pour une fois tout était intégralement accessible, ceci étant peut être dû à l'absence totale de touristes. Il s'agit pourtant d'un temple de dimensions très imposantes, objet de cultes extrêmement actifs et de pèlerinages.
Shiva sous sa forme Nataraja est le danseur cosmique bien connu (ici un bronze chola du XIIème, visible dans le musée de Tanjavur) : la jambe gauche levée, il tient dans ses deux bras supérieurs un tambour (le son primordial de la création de l'univers), une flamme (la destruction du monde), et fait avec deux autres mains un geste de protection et la désignation de sa jambe levée (espoir de liération). Il piétine un nain symbole de l'ignorance et est entouré d'un cercle de flammes symbolisant la succession des cycles cosmiques.
Shiva est un danseur tellement exceptionnel que lors d'un concours avec son épouse Kali, arbitré par Vishnu, il aurait ramassé une boucle d'oreille tout juste tombée avec son pied et l'aurait remise en place, mouvement qui lui assura la victoire.
Les quatre gopurams (portes d'entrée monumentales surmontées d'une haute pyramide) placés aux points cardinaux ont un soubassement en granit et sous couverts de sculptures en stuc entièrement peintes. De nombreuses statues de guerriers visent à écarter les démons. Mon guide me montre l'effigie d'un des rois cholas constructeurs à l'intérieur du gopuram est. Il est bien nourri. A côté une vue du gopuram sud, depuis l'intérieur de l'enceinte du temple.
L'intérieur du sanctuaire est constitué de galeries très larges, sculptées, sombres, conçues pour permettre la circumambulation des fidèles et des processions. Car il se passe toujours quelque chose dans ce temple : ici on oint une statue de Durga avec un liquide ocre, ailleurs on passe des flammes autour d'une statue de Siva. Fleuries, habillées, souvent noircies par les libations, enfoncées dans des niches auxquelles seuls les prêtres accèdent, sous le regard des fidèles alignés contre des barrières sur une vingtaine de mètres devant la niche, afin que tous puissent voir, les dieux sont difficilement reconnaissables. Un hindou me laisse sa place pour que je puisse mieux voir, et me guide jusqu'au rituel qui prend instantanément la relève. L'ambiance est fervente, beaucoup d'hindous prient ou se prosternent, mais détendue, d'autres se reposant contre des colonnes, mangeant, parlant ou dormant. Beaucoup de prêtres ont d'ailleurs les mêmes comportements quand ils n'officient pas.
Puis, à 19h, c'est la procession de la statue de Parvati allant rejoindre son époux Shiva pour la nuit. Elle est portée, sous un dais, sur un pavois par quatre prêtres torse nu, coiffés d'un chignon placé sur le côté du crâne. Ils sont précédés par des joueurs de tambours et de petites cymbales. Certains prêtres portent un smartphone coincé à la taille dans leur dhoti. Une fois les deux divinités réunies, les prêtres referment pudiquement la porte de la cellule.
Je ressors du temple bien content d'avoir vu autant de choses aussi intenses. Je n'aurai pas d'expérience plus forte pendant ce voyage.
Je récupère mon sac et file prendre un bus pour Kumbakonam, ma prochaine destination, où j'arriverai éreinté mais sur un nuage, très tard, dans un hôtel un peu défraichi, mais qui me servira dans ma chambre un repas chaud très correct.